Note de mise en scène

Le Soleil de minuit

On distingue d’ordinaire trois moments dans l’œuvre d’Ibsen : ce qu’on appelle ses « pièces de jeunesse » (dont quelques chefs d’œuvres encore jamais représentés en France !) ; les trois grandes pièces du milieu de sa vie (Brand, Peer Gynt et Empereur et Galiléen) ; et enfin, ce qu’on appelle « Les drames modernes », ce vaste massif de douze pièces, qu’il écrivit au rythme d’une tous les deux ans, entre 1877 et 1899. La Dame de la Mer, achevée en 1888, s’inscrit dans ce dernier ensemble, entre Rosmersholm et Hedda Gabler.

Or, les dernières pièces d’Ibsen ont en commun de finir par la mort des principaux protagonistes. Rebekka et Rosmer se jettent dans le torrent du moulin. Hedda et Løvborg se tirent une balle dans la tête. Solnesss tombe du haut de sa tour. Et tant d’autres… À ce titre, La Dame de la mer fait exception. Et la chose fait débat. On s’entend à reconnaître que c’est une pièce magnifique, mais (car il y a un mais…) dont la fin ne serait pas « convaincante ». L’auteur aurait commis une sorte de happy end, qui ne passe pas. Le plus souvent, les arguments sont extérieurs à la pièce elle-même. Cette « fin heureuse » viendrait contrarier le pessimisme d’un Ibsen prophète des désastres du siècle à venir. Ou bien, elle serait un retour à l’ordre bourgeois (la Nora de Maison de Poupée qui rentre au bercail !). Susan Sontag, en introduction à son « rewriting » de La Dame de la mer, affirme quant à elle que cette fin serait une faute dramaturgique.

Dans cette « polémique », nous prendrons le parti du texte. Et notre mise en scène se propose de faire mentir ceux qui donnent des leçons d’écriture à Ibsen, comme on donnerait des leçons de musique à Schubert. Non pas parce que ça ne se fait pas, mais parce qu’ils se trompent. Cette fin est non seulement « possible », mais « nécessaire ». Et elle engage le sens même de la pièce.

Mais de quoi s’agit-il ? D’une jeune femme, mariée avec un homme plus âgé, auquel elle se refuse depuis qu’ils ont perdu un enfant en bas âge, et qui est envahie par une étrange mélancolie, une « irrésistible nostalgie de la mer ». Elle a des visions. À tout moment apparaît devant elle, « en chair et en os », un marin avec qui elle s’est autrefois fiancée et qui a les mêmes yeux bleus que l’enfant mort.

Un homme arrive soudain, un « Étranger ». C’est lui. Il lui rappelle qu’il avait promis de revenir la chercher. À la fois effrayée et attirée par cet homme, elle demande à son mari de la protéger. L’Étranger se retire, en lui disant de se tenir prête pour le lendemain. Elle accuse alors son mari de l’avoir « achetée », et lui demande de la laisser partir avec le marin. Lorsque celui-ci revient, le mari décide de la laisser libre. Elle choisit finalement de rester et l’homme disparaît.

C’est cette fin, qui est contestée. Sur la forme comme sur le fond. Un oui à l’un, qui est un non à l’autre, et la pièce « se retourne », en effet. Mais ce « retournement » doit être entendu à son sens le plus haut. C’est un évènement. Qui annule tout ce qui l’a précédé.

Ellida était inscrite dans une histoire qui n’était pas la sienne. Son père, gardien de phare, l’avait baptisée d’un nom de bateau, sorte de « vaisseau fantôme » tiré d’une vieille saga islandaise. Plus tard, les gens de la ville l’ont appelée « La Dame de la mer », parce qu’elle se plongeait chaque jour dans l’eau, quel que soit le temps. Et les artistes rêvaient de la sculpter en femme de marin ou de la peindre nue échouée sur un rocher. Tout semblait la vouer à ce « destin de sirène ».

Or, son choix vient effacer d’un coup ce qui était écrit d’avance. Si leurs histoires se ressemblent étrangement, Ellida n’est pas la Senta du Vaisseau fantôme de Wagner, qui finit par se jeter à l’eau. Lorsque son marin revient, elle est prête, elle aussi, à faire le grand saut. Elle est bord de l’abîme. Wangel ne la retient pas. Il la laisse libre de son choix. Et la « métamorphose » a lieu.


On peut comparer ce geste, à plus d’un titre, à ce coup de génie des marins portugais, qui firent le pari, au péril de leur vie, qu’en s’abandonnant aux vents dominants, ils allaient rencontrer, au cœur de l’océan, les vents contraires, les alizés, en ce point de « retournement » que l’on a appelé la volta do mar. Ils se sont « fiancés aux vents » et ils ont découvert l’Amérique.

Le continent qu’Ellida découvre à son tour, à l’instant même où, libérée, elle décide de rester, n’est rien moins que son propre désir. Mais elle aura gagné les rivages de ce « nouveau monde » au prix d’une périlleuse traversée. Notre mis en scène sera le récit de ce voyage.

Comme toutes les grandes figures féminines d’Ibsen, Ellida est une « femme sous influence ». Mais, contrairement à la Rebekka de Rosmersholm, ou à Hedda Gabler, elle se libère. Et ce qui est encore plus singulier, c’est que la cage dont elle s’évade n’est pas celle qu’on aurait pu imaginer. Contrairement à Nora, c’est d’elle-même, qu’elle se libère. Et par la parole. C’est d’avoir eu le courage de nommer son emprise, qu’elle finira par s’en délivrer. D’où l’étrange écho que ce personnage devrait, aujourd’hui, rencontrer.

Lorsque j’ai proposé à Camille d’interpréter le personnage d’Ellida, elle m’a répondu qu’elle se sentait si proche de cette « Dame de la mer », qu’elle aurait pu aussi bien la chanter. Je me demandais alors comment donner corps, dans la mise en scène, à cette fusion du personnage avec la mer, à cette nostalgie, à cette douleur. Et il m’est apparu que le chant pouvait être ce « corps des larmes » d’Ellida, la musique étant un autre nom de la mer elle-même.

Nous avons donc convenu d’introduire ces plages de chants, qui interviennent à ces moments précis où Ellida s’évade vers sa « mer intérieure ». Le temps théâtral y est comme suspendu. Elle laisse alors venir ce qui monte en elle, ce qui fait retour comme ce qui veut naître en elle. Des moments d’invention, de pure création, voir d’improvisation qui, du cœur de la tempête, préfigurent en quelque sorte la « métamorphose » finale : la sirène devenue femme.

Claude Baqué – Novembre 2011


Écrits / Autour de La Dame de la mer

 

Henrik Ibsen / Premier Manuscrit de « La Dame de la mer »

Le petit point de relâche des vapeurs de touristes. On ne s’y arrête que lorsqu’il y a des voyageurs à débarquer ou à embarquer. Hauts fjelds escarpés tout autour. On ne voit pas la haute mer. Rien que le fjord sinueux. (…)

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P.G. La Chesnais / Notices

Le 10 novembre 1886, Ibsen écrivit à Brandès : « Nous irons peut-être en Danemark l’été prochain. Nous avons tous deux grande envie de passer quelques mois à Skagen. J’espère donc que nous nous verrons à Copenhague. » (…)

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Françoise Decant / La Dame de la mer ou le désir de l’impossible

Ferenczi s’était beaucoup intéressé à la Dame de la mer, et il était allé jusqu’à faire un rapprochement entre l’intrigue de la pièce et la dynamique d’une analyse mettant le mari, le docteur Wangel, en place de psychanalyste. (…)

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Sylviane Agacinski / L’Appel de la mer : Ellida

La Dame de la mer (1888) est une pièce à part. C’est la seule œuvre dans laquelle Ibsen ose traiter directement de la folie du désir, même si c’est pour mieux en programmer la guérison. Je ne peux m’empêcher d’y voir le pendant de Brand, comme si, (…)

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Lou Andreas Salomé / Ellida

Contagion, maladie, mort – voilà les noms servant à dénoter l’attraction, l’amour, le mariage dans Rosmersholm. Ce sont, en effet, les vieux antonymes de l’instinct et du dogme,  (…)

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Bernard Shaw / The Lady from the sea

Ibsen’s next play, though It deals with the old theme, does not insist on the power of Ideals to kill, as the two previous plays do. It rather deals with the origin of ideals In unhappiness, (…)

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Jules de Gaultier / De la transsubstantiation dramatique

Voici une pièce qui renferme, outre les éléments primordiaux constitutifs de tout drame d’Ibsen, un exemple de cette sorte : La Dame de la Mer. Evoluant au premier plan du drame, c’est l’intrigue que l’on connaît  (…)

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Henri Bordeaux / Henrik Ibsen

« Je ne suis pas celle que tu croyais épouser » murmure douloureusement Ellida à son mari Wangel dans la Dame de la mer. Là non plus leur vie conjugale n’est point faite de franchise et de sincérité.  (…)

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Jacques Robichez / Initiation de Lugné-Poe à Ibsen

Pour quelles raisons le choix des Escholiers s’était-il porté surLa Dame de la Mer ? Chronologiquement, la pièce précède immédiatement Hedda Gabler. Les deux drames avaient été joués à Londres au printemps de 1891 à quelques jours d’intervalle. (…)

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Michael Meyer / The Lady from the sea – Introduction

The Lady from the Sea represents an important turning-point in Ibsens work. He wrote it in 1888, at the age of sixty ; it was the twenty-first of his twenty-six completed plays. Twenty years before, having explored the possibilities of poetic drama (…)

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Sandor Ferenczi / Suggestion et Psychanalyse

Il n’est pas rare de retrouver dans nos analyses le drame qui se joue de façon si émouvante dans la pièce d’Ibsen, La Dame de la Mer. L’héroïne est la femme d’un médecin qui, bien qu’elle ait tout pour être heureuse, est la victime d’obsessions graves. (…)

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Otto Rank / Le Motif de l’époux de retour chez lui

Ce motif de l’époux de retour chez lui est présent, spécialement dans les chansons populaires, dans la littérature du monde entier mais apparaît le plus souvent détaché de sa racine dans le roman familial incestueux, (…)

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G. Jung / Lettre à Freud du 10 octobre 1907

Très honoré Monsieur le Professeur! Recevez les plus chaleureux remerciements pour l’excellente photographie et la splendide médaille. Tous deux me font extraordinairement plaisir. Je vais immédiatement vous envoyer également mon portrait, (…)

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Monique Borie / Ibsen ou les multiples visages des revenants

L’impossible clôture d’un espace humain toujours menacé par les puissances d’un dehors, véritable espace d’une altérité menaçante, constitue aussi, dans cette fin du XIXè siècle, l’un des pivots de la dramaturgie ibsénienne (…)

Ibsen ou les multiples visages des revenants / Monique Borie

 

Scène des Revenants. Edvard Munch, 1906

Scène des Revenants. Edvard Munch, 1906

L’Étranger comme avatar du fantôme

Extrait de Le Fantôme ou le théâtre qui doute, de Monique Borie. Actes Sud, 1997, p 179-190.

L’impossible clôture d’un espace humain toujours menacé par les puissances d’un dehors, véritable espace d’une altérité menaçante, constitue aussi, dans cette fin du XIXè siècle, l’un des pivots de la dramaturgie ibsénienne. L’intrus, l’étranger, là non plus n’est pas davantage que chez Maeterlinck un fantôme, au sens d’un mort qui revient pour dialoguer avec les vivants. Toutefois, il n’en incarne pas moins la menace d’étranges puissances – ces puissances qui font retour, venues d’un ailleurs du temps et de l’espace, dont les territoires s’apparentent à ceux de la mort. S’agissant d’Ibsen, l’on pourrait reprendre l’idée du « troisième personnage », avec cette différence qu’il a le plus souvent, chez Ibsen, le visage du passé. Depuis Les Piliers de la société jusqu’à Quand nous nous réveillerons d’entre les morts, toutes sortes de « revenants », vrais-faux fantômes, feront à leur manière de la maison humaine un espace qu’un troisième personnage peut toujours venir hanter.

Dans Les Piliers de la société, à Mlle Bernick rêvant de fuir « loin de tout cela sur l’océan sauvage », Rôrlund répond par l’affirmation de la nécessité de « fermer sa porte à un visiteur aussi dangereux ». Il est mieux d’être ici « tournant le dos à tout ce qui pourrait nous perturber ». La présence menaçante, inquiétante et fascinante à la fois, de ce dehors qui perturbe, de cette altérité d’un espace sauvage d’où peut venir le « visiteur dangereux » est une des clés de l’univers d’Ibsen. Tel le fantôme qui revient de la mort, l’étranger, le marin revenu du voyage en mer incarnent cette figure du passé que l’on croyait mort et qui resurgit. Ainsi, dans cette même pièce, Les Piliers de la société, le retour d’Amérique, retour par mer de celui qui ne parvient pas à disparaître une fois pour toutes, associe le thème de l’étranger, de l’océan et du passé qui revient. De façon analogue dans La Dame de la mer, l’Etranger qui apparaît, celui que l’on croyait noyé et qui selon Lyngstrand « doit être revenu pour se venger de sa femme infidèle », est bien un équivalent dramatique du fantôme vengeur. Cet Etranger qu’Ellida reconnaît à ses yeux lorsqu’il fait irruption dans la réalité, a été précédé de son fantôme dont la force de présence n’avait rien à lui envier. Grand est le poids de chair en effet de cet homme mort en mer, noyé, qu’Ellida a trahi et qui l’obsède. « Parfois c’est comme s’il se dressait soudain devant moi, en chair et en os. Ou plutôt pas tout à fait devant. Il ne me regarde jamais. Il est là, tout simplement. » Avec toute la puissance silencieuse du fantôme incarné, il est là dans ce fantôme du dedans qu’elle voit avec son esprit. La force de possession par le fantôme de l’homme cru mort, sa force de présence sont telles que l’enfant qui n’est pas de lui à ses yeux. Ces pouvoirs du fantôme, Ellida les formule à travers le sentiment qu’il était revenu quand elle attendait l’enfant. Sa force de présence en effet n’est pas seulement psychique car tout se passe comme s’il s’était emparé physiquement d’elle « en chair et en os ».

Il y a plus : une parenté étrange s’établit entre le fantôme et celle qu’il obsède. Ellida en effet appartient elle aussi au « peuple de la mer », elle aussi se sent et se dit une étrangère. Elle est celle qu’on appelle « la Dame de la mer », pas seulement parce que sa seule joie est de plonger dans la mer mais parce que cette passion pour la mer, son rapport intime avec les oiseaux de mer font d’elle un être de partout et de nulle part, tels ces marins pareils à des oiseaux migrateurs (comme le capitaine Horster de Un ennemi du Peuple). Aussi y a-t-il en elle ce même mélange de pouvoir de fascination et de pouvoir de terreur que celui qui la liait à cet homme. L’attirance qu’elle éprouvait pour lui était mêlée de peur, « une peur si effroyable comme seule la mer peut en inspirer ». « Cet homme est comme la mer », tel est le secret de l’attraction qu’il exerce. Mais elle aussi terrifie et attire. Elle est cet « effroyable » qui fascine, ce même effroyable qu’elle porte en elle, auquel elle se sent appartenir : « L’effroyable c’est l’attirance qui est au fond de mon âme », avoue-t-elle. Il s’agit d’une attirance liée à la mort mais ressentie en même temps comme la vraie vie. Les puissances de la mer sont là comme puissances de mort mais aussi comme figures du sans-nom, du sans-borne, cristallisant ce « désir de l’impossible » que Wangel lui-même reconnaît douloureusement en elle et qui « précipitera (son) âme dans les ténèbres de la nuit ». Seule la force de l’amour de Wangel, capable de lui rendre sa liberté, la délivrera finalement de ce pouvoir de fascination et de terreur de la mer et de l’Etranger revenu de la mer. (…)

 

 

Le motif de l’époux de retour chez lui / Otto Rank

 

Das Motiv des Heimkehrenden Gatten [Le Motif de l’époux de retour chez lui]
Tiré de Das Inzest Motiv in Dichtung und Sage [Le Motif de l’inceste dans la fiction et dans les mythes]

(…) Ce motif de l’époux de retour chez lui est présent, spécialement dans les chansons populaires, dans la littérature du monde entier mais apparaît le plus souvent détaché de sa racine dans le roman familial incestueux, bien qu’il s’origine dans la constellation incestueuse infantile et ne peut être compris qu’à partir de celle-ci. Que ce motif du retour de l’époux, qui est aussi à la base du mythe d’Agamemenon et de celui d’Ulysse, soit mis en forme par le fils et représente le fantasme de celui-ci quant à l’élimination de l’encombrant père et à l’appropriation sans entrave de la mère, ne se démontre pas seulement par le fait qu’il sera assassiné ou qu’ultérieurement il cèdera volontairement, dans un affaiblissement sentimental, sa femme et son rival, mais aussi par le fantasme typique du garçon de l’absence ou du départ du père, lequel sera tenu pour mort (c’est-à-dire qu’on lui souhaite la mort), comme dans Phèdre.

(Traduction d’Elizabeth Müller, Psychanalyse n°18)

Note de bas de page :

«Du point de vue de la femme, ce fantasme du retour de l’époux chez lui est traité dans la pièce d’Ibsen « La Dame de la mer », où l’Étranger est tenu pour mort et se présente devant la seconde femme de Wangel pour la récupérer. La signification inconsciente de cette emprise de l’étranger sur la femme, qui se refuse même à son époux, devrait bien être celle d’une fixation infantile au père, qui en tant que gardien de phare se fond avec l’homme de la mer en une même personne. Wangel dit carrément : « Je suis beaucoup beaucoup plus âgé qu’elle. J’aurais dû être un père pour elle. » La relation au père a également été traitée par Ibsen dans Rosmersholm. »

(Traduction de Claude Baqué)

 

Camille et La Dame de la mer

 

« Je suis tombée sous le charme de La dame de la mer dès la première lecture. Comment ne pas m’identifier à cette femme si moderne qui, justement, s’applique à rompre le charme ? Qui, plutôt que de céder, telle une héroïne tragique, à un inextricable conflit intérieur, accepte de s’en libérer par le dialogue ?

En choisissant son mari plutôt qu’un ténébreux marin, elle se libère de ses propres fantasmes et ouvre la voie au véritable amour et, selon moi, à la création…

C’est à cet appel du large au sens onirique que je réponds. Jouer la dame de la mer, c’est lui donner une voix, une voix qui parle, qui dialogue, mais aussi une voix qui chante, qui s’égare d’abord pour enfin s’incarner, qui de voix intérieure se mue en célébration de l’eau et des rêves.»

Camille

 

 

 

 

 

Écrits / Sur Henrik Ibsen

 

  James Joyce / Le nouveau drame d’Ibsen

«Dans leur jeunesse, les grands hommes ont parfois des admirations exclusives : Joyce isolé en Irlande catholique se défendit mal contre le mythe qui faisait d’Ibsen le grand dramaturge révolutionnaire de l’émancipation universelle. Il alla même jusqu’à étudier le norvégien pour mieux goûter, dans leur plein texte, les œuvres de son idole (…)  lire la suite

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  Ludvig Binswanger / La vie comme un drame sur la scène du monde

« Se réaliser soi-même dans la conduite de sa vie, c’est, selon, moi, la chose la plus haute qu’un homme puisse atteindre. Cette tâche, nous l’avons tous, les uns comme les autres, mais la plupart des gens la bâclent.» Henrik Ibsen avait cinquante-quatre ans quand il écrivit ces mots à l’ami qui devait être la personne « la plus grande » et la« direction de sa vie », à Björnstjerne Björnson (…)  lire la suite

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  Rainer Maria Rilke / Les Cahiers de Malte Laurids Brigge

Et voici que j’étais devant tes livres de têtu et que j’essayais de les imaginer, à la manière de ces étrangers qui ne respectent pas ton unité, de ces satisfaits qui se sont taillés une part dans toi. Car je ne connaissais pas encore la gloire, cette démolition publique d’un qui devient et dans le chantier duquel la foule fait irruption en déplaçant les pierres (…) lire la suite

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  Jean Cocteau / À Cheval sur le réel et le rêve

Ibsen. Il est difficile de tenir entre nos mains cette neige sombre et comme éclairée par le soleil noir de la mélancolie de Dürer. Un schizophrène habite tous les artistes. Beaucoup en éprouvent de la honte et le cachent. D’autres ne sont que sa main-d’œuvre. D’autres collaborent avec lui. Sans ce fou mêlé à nos ténèbres intimes, une œuvre de poète ne serait rien (…) lire la suite

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  Jean-Pierre Sarrazac / L’Épilogue ibsénien

« Epilogue dramatique » : c’est ainsi qu’Ibsen qualifiait Quand nous nous réveillerons d’entre les morts (1899), la pièce qui, écrite peu avant son attaque d’apoplexie, fut son ultime œuvre littéraire. La formule convient parfaitement à ce drame où un grand sculpteur et son ancien modèle ne se retrouvent après des années de séparation que pour se déclarer leur amour mutuel  (…) lire la suite